Les réacteurs nucléaires de demain
Publié le 17.08.2015Lecture 10 min
Énergie bas carbone et donc utile dans la lutte contre le , le nucléaire est confronté à des enjeux de raréfaction de la ressource uranifère et de gestion des déchets radioactifs. Les solutions résident dans l’innovation et le développement de réacteurs de 4e génération utilisant mieux leur .

© CEA - Circuit primaire du démonstrateur technologique Astrid
Les réacteurs de 4e génération
Les réacteurs qui fonctionnent aujourd’hui sont de 2e génération. Les réacteurs de 3e génération, déjà en construction, comme en France le réacteur pressurisé européen (EPR) de Flamanville, ne constituent pas une rupture technologique mais ont intégré les retours d’expérience et accru les dispositifs de sécurité. L’objectif de la 3e génération est d’éviter, même en cas d’accident grave, l’évacuation des populations au voisinage de la centrale.
Des recherches sont en cours pour développer des réacteurs de 4e génération plus performants en matière de durabilité des ressources d’ , de sûreté, et de prolifération. La recherche est conduite notamment au niveau international au sein du Forum International Génération IV qui rassemble treize pays1.
Le Forum a retenu six technologies de réacteurs :
- trois types de réacteurs à neutrons rapides dont la particularité est de pouvoir consommer l’intégralité du combustible nucléaire tout en multi-recyclant le plutonium produit par les réacteurs nucléaires actuels. La technologie de ces réacteurs se distingue selon que leur est l’hélium, le sodium ou le plomb.
- le réacteur à très haute température, capable de produire de la pour les besoins industriels, et le réacteur à eau super critique permettant d’améliorer le rendement des centrales nucléaires. À la différence des réacteurs à neutrons rapides, ces deux types de réacteurs ne permettent pas d’économiser la ressource uranifère ni de recycler le plutonium ;
- le réacteur à sels fondus dans lequel le caloporteur est aussi le combustible nucléaire.
Les caractéristiques des réacteurs à neutrons rapides
À quantité d’uranium naturel équivalente, les réacteurs à neutrons rapides permettraient de produire au moins 60 fois plus d’énergie que les réacteurs contemporains. La durabilité des réserves mondiales d’uranium change d’échelle et passe de centaines d’années à des centaines de milliers d’années.
Un atout supplémentaire de ces réacteurs à neutrons rapides est la transmutation : la possibilité de réutiliser certains actinides mineurs (principaux contributeurs de la durée de vie et de la toxicité de la ) pour réduire le volume des déchets les plus radioactifs par 10 et diminuer leur toxicité d’un facteur 100.
La transmutation vise à casser le noyau lourd d'un élément (plutonium, neptunium, américium ou curium), qui reste radiotoxique pendant des centaines de milliers d'années, en deux noyaux plus légers, qui perdront leur radioactivité en quelques siècles. En moins de 500 ans, ils peuvent retrouver un niveau de radioactivité équivalent à celui de l’uranium naturel utilisé pour fabriquer les combustibles nucléaires actuels.
La France : pionnière dans cette filière
Dès 1959, la France avait étudié les réacteurs à neutrons rapides et mis en service en 1986 Superphénix. Exploité pendant onze ans, ce réacteur a permis d’acquérir une première expérience dans l’utilisation du sodium en fluide caloporteur .
La France et les réacteurs à neutrons rapides
Dès 1959 le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) a commencé la construction d’un prototype de réacteur à neutrons rapides : RAPSODIE (40 MWth) a démarré en 1967 et a été arrêté en avril 1983. Ce fut ensuite PHENIX, prototype industriel de 250 MWe, qui a fonctionné de décembre 1973 à février 2010. Son démantèlement est en cours. Enfin SUPERPHENIX (1240 MWe) qui fut couplé au réseau en janvier 1986. Son fonctionnement a été perturbé par plusieurs incidents techniques et de nombreuses oppositions. Un arrêté ministériel du 30 décembre 1998 imposa son arrêt définitif.
Le sodium montre une faible activation sous les neutrons, ce qui réduit la quantité de déchets radioactifs. Il offre également d’excellentes garanties de sûreté notamment face aux incidents de perte de source froide externe. Cependant, le sodium est fortement réactif à l’eau et l’air.
Le déploiement industriel de réacteurs à neutrons rapides de 4e génération refroidis au sodium nécessite la qualification préalable, à une échelle représentative, des diverses avancées technologiques appelées par les objectifs de performance assignés à cette nouvelle génération. C'est dans ce contexte que le projet de construction du démonstrateur technologique Astrid a vu le jour. Sa (1 500 mégawatts thermiques, soit 600 mégawatts électriques environ) a été définie pour concilier une flexibilité d’utilisation suffisante et la nécessaire représentativité au regard des principaux aspects industriels. Le projet Astrid vise ainsi à préparer le futur et faire en sorte qu’une filière de 4e génération atteigne une maturité technologique pour la seconde moitié de ce siècle en France2.
L’énergie du soleil
Les chercheurs travaillent également sur des réacteurs en rupture totale avec la technologie actuelle : la . L’objectif est de reproduire sur Terre la production d’énergie solaire en fusionnant des noyaux très petits, des isotopes de l’ (le deutérium et le tritium). Un premier prototype devrait en démontrer la faisabilité technique dans 15 ans.