Où en est le nucléaire dans le monde ?

Actualisé le 23.10.2023
Lycée
Histoire, géographie et géopolitique

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L'industrie nucléaire évolue lentement et ses résultats ne se mesurent que sur des décennies. En effet, la construction d’un réacteur prend environ 10 ans et sa durée d’exploitation est de 50 à 60 ans. Cette filière est cependant sensible aux événements extérieurs tels qu’un accident comme Fukushima en 2011 ou une crise économique mondiale qui la ralentissent, ou encore une perturbation grave de l’approvisionnement en gaz ou en pétrole comme pendant la guerre en Ukraine depuis 2022 qui la stimule. En 2023, le nucléaire semble être à l’aube d’une phase de relance. Voici un tour d’horizon mondial.

Un navire livre du combustible nucléaire MOX à la centrale de Takahama au Japon

Début 2023, environ 440 réacteurs nucléaires sont en opération dans le monde, dans 32 pays. Leur capacité totale est d’environ 390 gigawatt ce qui assure environ 10 % de l’électricité mondiale. Environ 60 réacteurs sont en construction dans 15 pays, essentiellement en Chine, en Inde et en Russie1. Mais beaucoup d’autres projets sont dans les cartons, par exemple en France où il est prévu de reprendre la construction d’EPR sur le modèle de celui du Flamanville, dans la Manche. Les opinions publiques, notamment en Europe, paraissent moins hostiles qu’elles ne l’ont été à cette forme d’énergie. 

Trois facteurs favorables

Ces conditions plus favorables sont soutenues par trois facteurs :

  • La prise de conscience de la nécessité de lutter contre le . Si le nucléaire n’est pas une énergie renouvelable (elle dépend du minerai d’ ), elle est néanmoins une énergie décarbonée. Elle ne contribue pas aux émissions de gaz à contrairement aux énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz).
  • Les incertitudes des marchés du gaz créées notamment par la guerre en Ukraine. L’Europe s’est volontairement privée du gaz et du pétrole venus de Russie, ce qui a poussé les prix de l’énergie à la hausse. L’existence d’une industrie nucléaire nationale, ne dépendant pas d’un approvisionnement extérieur aléatoire, renforce la souveraineté énergétique des Etats. 
  • Un monde futur dominé par l’électrique. La transition vers les véhicules électriques, les besoins exponentiels des services numériques, le recul du gaz dans le chauffage de l’habitat, le développement de l’ , la désalinisation de l’eau de mer, toutes ces évolutions vont exiger beaucoup d’électricité. Or un produit de l’électricité de façon massive et stable.

Un retour sur l’histoire

Ce sont déjà des facteurs extérieurs qui avaient fait décoller le nucléaire civil. Les chocs pétroliers dans les années 1970 avaient soutenu un essor puissant et continu de la filière nucléaire. A la fin des années 1980, le nombre de réacteurs dans le monde atteignait 400.

La catastrophe de (1986) avait fait monter le sentiment anti-nucléaire de l’opinion et les impératifs de sécurité avaient augmenté le coût des centrales.  Au tournant des années 2000, les experts s’attendaient à une « renaissance ». Mais celle-ci fut largement freinée par les crises financières et économiques de 2007-2008 et surtout l’accident de Fukushima en 2011, dans un pays, le Japon, considéré comme un des meilleurs en matière de sécurité. L’Allemagne décida alors de sortir du nucléaire.

Les perspectives des prochaines années 

L’Agence internationale de l’énergie a défini un chemin, très ambitieux, pour parvenir à la neutralité carbone en 2050, le 2. Dans ce scenario idéal, la capacité nucléaire ferait plus que doubler entre 2020 et 2050. La filière nucléaire représenterait alors 17 % de l’électricité mondiale, contre 12 % en 2022. Si sa part en pourcentage ne double pas, c’est que la production électrique dans son ensemble connaîtra un grand essor. Le monde deviendra de plus en plus « électrique ». Le sera alors dominé à 80 % par les énergies renouvelables. Les énergies fossiles, y compris le gaz naturel, ne participeront quasiment plus à la production d’électricité.

Les 3 pays nucléaires « historiques » sont les États-Unis, la France et le Japon.

Les pays pour et contre

Ceux qui sont pour : 

  • Créée à l’initiative de la France, une « Alliance du nucléaire » européenne rassemble les pays qui veulent s’appuyer sur l’énergie nucléaire, aux côtés des renouvelables. (Bulgarie, Croatie, Estonie, Finlande, Hongrie, Pays-Bas, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovénie, Slovaquie, Suède). La Belgique et l’Italie envisagent de revenir vers le nucléaire. 
  • Les Etats-Unis et le Canada poursuivent leurs programmes et comptent particulièrement sur les petits réacteurs SMR.
  • En Asie, la Chine, qui dépend beaucoup du charbon pour son électricité, prévoit la mise en service d’environ cinq réacteurs par an. Le Japon a redémarré son parc nucléaire malgré le souvenir de Fukushima. L’Inde poursuit le déploiement de ses réacteurs « made in India ».
  • Les Émirats arabes unis ont inauguré leur première en avril 2021 et en ont trois autres en construction. La Turquie développe aussi un programme.

Ceux qui sont contre :

  • Autrefois très engagée dans le nucléaire, l’Allemagne a confirmé la fermeture de toutes ses centrales, après avoir hésité à les prolonger. L’Espagne et la Suisse restent réticentes tout en évitant de fermer trop vite ses centrales.

 

1Source : World nuclear association

2Source : scenario de l’AIE (septembre 2023)

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