Sables bitumineux : défi majeur en terme de R&D

Publié le 22.08.2014
Lycée
Sciences de la vie et de la terre

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Dans un contexte de raréfaction du pétrole conventionnel, les sables bitumineux constituent un immense enjeu. Leur exploitation, complexe, soulève toutefois des problèmes environnementaux. Un défi majeur en termes de R&D pour les compagnies pétrolières.

Un échantillon de sables bitumineux en cours d'analyse

Les sables bitumineux, ou bitumeux, sont un mélange de sable, d’argile, d’eau et de pétrole extra-lourd (huile très visqueuse). Au Canada, compte tenu du climat froid, cette huile n’est pas mobile, d’où l’appellation habituelle de . Dans le nord du Vénézuela, dans la « ceinture de l’Orénoque », un long bassin étiré sur 600 km, où la température des réservoirs est de l’ordre de 50 °C, la même huile extra-lourde est plus fluide et peut être pompée. La production peut alors se faire à froid, selon un schéma relativement classique.

Les sables bitumineux du Canada, au nord de la province d'Alberta, dans la région de l’Athabasca, sont si visqueux qu’ils sont figés dans leurs réservoirs. Leur récupération pose des problèmes techniques difficiles, à tel point qu'ils n'intéressent vraiment l'industrie pétrolière que depuis que les réserves en pétrole conventionnel montrent leurs limites.

L’enjeu est immense : plus de 300 milliards de barils de ressources, à comparer au chiffre total de 1 700 milliards de barils de pétrole généralement retenus pour évaluer les ressources prouvées dans le monde entier. Les sables bitumineux du Canada représentent des réserves pétrolières équivalentes à celles de l’Arabie saoudite, estimées elles-mêmes à 1/5ème des réserves mondiales de pétrole conventionnel. C'est ainsi que le Canada est devenu le principal fournisseur de pétrole des États-Unis… devant l’exportateur saoudien.

Les sables bitumineux canadiens s’étendent sur une zone de 140 000 km2, soit 3 % de la surface totale de l’immense forêt boréale canadienne. Les gisements s’étalent sous forme de couches, de quelques dizaines à quelques centaines de mètres de profondeur.

Deux types d’exploitation

Cette configuration à faible ou grande profondeur conduit à deux techniques d’exploitation différentes.

D’une part, une exploitation minière à ciel ouvert pour les dépôts proches de la surface. Après avoir dégagé le sol et mis de côté le terreau de surface en vue de la réhabilitation ultérieure du site, on creuse une carrière pour atteindre les gisements et extraire les sables. Il faut environ deux tonnes de sables bitumineux pour récupérer un baril de bitume, ce qui implique de gros travaux de terrassement. Des camions de plus de 365 tonnes, hauts comme des immeubles de 3 étages, ont été spécifiquement conçus pour ces travaux colossaux !

D’autre part, une exploitation thermique pour les gisements au-delà de 100 mètres de profondeur, avec creusement de puits où l’on injecte de la vapeur pour fluidifier le bitume. C’est le cas de 80 % des sables bitumineux canadiens. L’empreinte au sol de cette production dite in situ est moindre que celle de la technique minière puisque seule une toute petite surface au sol est impactée. La production thermique se pratique habituellement selon deux procédés différents :

  • le procédé Cyclic Steam Stimulation (CSS) consiste à utiliser un même puits vertical alternativement en injection de vapeur et extraction de bitume. La vapeur liquéfie le bitume et rend le possible ;
  • le procédé Steam Assisted Gravity Drainage (SAGD) s’appuie sur des paires de puits horizontaux. Il consiste à injecter de la vapeur par le puits supérieur pour fluidifier le bitume, puis à pomper le mélange eau-bitume récupéré dans le puits inférieur.

Le choix du procédé dépend des caractéristiques propres à chaque gisement.

Les impacts sur l’environnement

Ces exploitations dans un contexte technique difficile ont un fort, essentiellement dans trois domaines :
  • elles exigent d’importants volumes d'eau ;
  • elles nécessitent beaucoup d’énergie (vapeur, électricité, ) et génèrent donc de fortes émissions de CO2 ;
  • elles influent sur l'écosystème par des perturbations de la faune et la flore.

Des études et des améliorations techniques sont cependant menées depuis plusieurs années pour limiter les impacts sur la gestion de l’eau, améliorer l’ et assurer la remise en état des sites d'extraction arrivés en fin de vie.

C’est un défi majeur pour les grandes compagnies pétrolières : la nécessité d’exploitations économiquement viables, l’impératif de lutte contre le , de même que les réglementations strictes des autorités, rendent incontournables les investissements en recherche et développement.

La longue histoire du bitume…

Récolté dès l’Antiquité sur les bords de la mer Morte, le bitume fut utilisé comme cosmétique et produit pharmaceutique par les Hébreux et les Sumériens. Les Égyptiens l’employèrent pour la conservation des momies et pour le calfatage des navires.

La première société pétrolière de l’histoire fut sans doute créée en France, en 1741, pour exploiter une veine de sable bitumineux située à Pechelbronn, en Alsace. On en tirait de l'huile pour lampe, des produits pharmaceutiques, de la poix et de la graisse, que le karichschmiermann, marchand ambulant de la région, vendait aux paysans pour leurs essieux de chariots. En 1927, cette société deviendra la SHA, Société des Huiles Antar.

Les Amérindiens n’étaient pas en reste : ils récoltaient le bitume de l’Athabasca qui affleurait à la surface pour étanchéifier leurs canoës. À la fin du XVIIIe siècle, Robert Fitzsimmons sépara ce bitume du sable pour recouvrir les routes et les toitures.

 

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