La sûreté nucléaire : anticiper les risques

Actualisé le 15.05.2023
Lycée
Sciences et technologies de l’industrie et du développement durable

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L’industrie nucléaire est très réglementée et remarquablement sûre. Mais la gravité des accidents lorsqu’ils se produisent, leur impact immédiatement mondial et leurs répercussions sur les opinions publiques font qu’elle ne peut se permettre aucun dysfonctionnement grave.

Les incidents et accidents nucléaires sont classés selon une échelle internationale, appelée l’échelle INES (International Nuclear Event Scale). Le niveau 0 répertorie des anomalies n'ayant aucune conséquence sur la sûreté. De 1 à 3, il s'agit d'incidents. Et, à partir de 4, on parle d'accidents. À titre d’exemple, en 2013 en France, ont été déclarés à l’ , 1 018 anomalies, 103 incidents de niveau 1, 2 de niveau 2 et aucun incident ou accident au-delà1.

L’industrie nucléaire française n’a enregistré que des « incidents », jamais d' « accidents ».

L’accident grave d’un (de 5 à 7 sur l’INES) est caractérisé par la fusion lente du cœur, c’est-à-dire du , sous l’effet de la qu’il dégage. Un magma en fusion, appelé corium, se forme peu à peu. Il risque de percer la cuve, voire le fond du bâtiment réacteur qui constitue la dernière barrière de protection. Des rejets importants de matière radioactive, dont notamment de l’iode et du césium, peuvent alors se produire hors du site.

Trois accidents majeurs

  • Aux États-Unis, le 28 mars 1979, l'accident de Three Mile Island, en Pennsylvanie, sur la côte Est densément peuplée, a affecté le cœur du réacteur à eau pressurisée qui fond en partie. La situation est toujours restée sous contrôle et la contamination a été contenue à l'intérieur de l'enceinte de confinement. Il fut classé rétroactivement au niveau 5.
  • En Ukraine, le 26 avril 1986, l'accident de a touché un réacteur de type RBMK (Reaktor Bolshoy Moshchnosti Kanalnyi), sans enceinte de confinement, entraînant d'importants dégâts humains, matériels et environnementaux. Il a été classé niveau 7 sur l’échelle de l’INES. Provoqué par une défaillance humaine, il a entrainé la perte du contrôle du réacteur. Le graphite du cœur du réacteur a brûlé pendant une dizaine de jours, rejetant dans l'atmosphère une quantité importante de produits radioactifs. Le « panache » de Tchernobyl a survolé une partie de l’Europe. Trente-deux personnes sont décédées dans les trois mois qui ont suivi l'accident, plusieurs milliers ont été gravement irradiées, et une polémique perdure sur le nombre de personnes affectées à long terme.
  • Au Japon, le 11 mars 2011, un très fort séisme a entraîné l’arrêt automatique de tous les réacteurs dans la de Fukushima. Le tsunami qui a suivi a noyé les générateurs électriques et privé les réacteurs à eau bouillante de leur dernier , rendant inévitable à court terme la fusion des cœurs. Le dégagement d’ a provoqué des explosions qui ont gravement endommagé les bâtiments des quatre tranches affectées du site. S’en sont suivis des relâchements importants dans l’atmosphère qui ont amené le gouvernement japonais à décider de l’évacuation d’environ 120 000 personnes du voisinage du site. L’accident a été classé niveau 7.
7 :
le nombre de niveaux d’incidents et d’accidents sur l’échelle internationale INES

Les enseignements

Chacun de ces accidents a mené les ingénieurs à identifier les fragilités des réacteurs en activité :

  • L’accident de Three Mile Island a conduit à améliorer le pilotage des réacteurs et la formation des opérateurs. Il a conduit à prendre conscience que, malgré tous les systèmes de prévention, un accident avec fusion du cœur pouvait se produire. Des moyens de « gérer » ce type d’accidents ont été mis en place : filtres permettant de décomprimer l’enceinte en limitant les rejets, recombineurs d’hydrogène pour éviter toute explosion. Ces dispositifs ont été implantés sur de nombreuses centrales (dont le parc français) mais n’existaient pas à Fukushima.
  • L’accident de Tchernobyl a conduit à étudier la dissémination des particules radioactives dans les airs et leur dépôt sur le sol. Celle-ci n’est pas concentrique, mais « en peau de léopard », compte tenu de l’influence des vents. Il a mené aussi à améliorer le confinement sur les réacteurs de troisième génération, comme l’European Pressurized Reactor (EPR) français. Par exemple, la mise en place d’un « cendrier », sur un radier de plusieurs mètres de béton, pour contenir d’éventuelles fuites d’un corium ayant percé la cuve.
  • L’accident de Fukushima a mis en avant l’importance des deux éléments simples qui permettent de reprendre en 48 heures le contrôle d’un réacteur : l’eau et l’électricité, indispensables aux opérations de refroidissement du cœur. Placer les générateurs en hauteur, prévoir des générateurs mobiles de secours, stocker de l’eau à proximité immédiate sont apparus comme des précautions indispensables. La mise en place de forces d’intervention rapides, capables d’agir de façon autonome sur plusieurs sites en même temps, a été engagée, notamment en France, pour faire face à des situations de catastrophes naturelles, comme celle enregistrée au Japon. La gestion de l’information de public et de l’organisation des mouvements de population ont également été étudiées.

 

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